L’artiste

L’ARTISTE

Héritier d’une tradition musicale orale, Jacky Craissac acquiert dès les années 1960 une renommée internationale de batteur et percussionniste en modern jazz avant de devenir un « maître du son », créateur de ses instruments, véritables sculptures sonores et de sa musique.

Jazz : une notoriété internationale

Jacky Craissac débute une carrière de percussionniste et de batteur professionnel de jazz en 1961.

Le jazz… un style musical qui correspond bien à son caractère et à sa personnalité : l’improvisation lui offre une extraordinaire liberté d’expression et d’interprétation et une créativité personnelle en interaction avec les autres musiciens de la formation et le public.

Toutes les portes s’ouvrent à lui. Mais en 1964, préférant le voyage à la notoriété, le contact avec le public au travail de studios, il part à la découverte d’autres cultures, d’autres musiques et de musiciens étrangers.

« Une période formidable de ma vie ! », dit-il, « partir, voyager et jouer. »

Tournées en France et à l’étranger – Des années soixante aux années soixante-dix

De 1962 à 1969, les tournées internationales s’enchaînent. Il y participe avec un quintet suisse, avec plusieurs jazzmen américains comme Hal Singer, Bill Coleman, Al Lirvat, Lou Bennett, Ann Peter (chanteuse des Peter Sisters), Vince Benedetti, Dizzy Reece… Tournées qui le conduisent en Grèce, Egypte, Turquie, Liban, Yougoslavie, Hongrie, Israël, Suisse, Autriche, Italie, Antilles, Maroc…

Ses premiers enregistrements en grande formation ont lieu à Rome en 1969 avec le vibraphoniste Lorenzi dans le cadre de Folklore du Monde, puis pour le Théâtre National de Belgique à Athènes.

Il donne des concerts à la radio nationale italienne et participe à la création de musique de films à Rome et à Paris.

On le voit aussi sur scène en France aux côtés de Guy Lafitte, Christian Escou, Christian Ibañez.

Lorsqu’il revient en Aquitaine, il se produit au Casino d’Arcachon, à l’Alhambra, au CNP Capitole (festival jazz de SIGMA) et dans les lieux bordelais branchés de l’époque : La Cour des Miracles, le Chai, les Trois Chaises, les Argentiers et le Jimmy.

Il parcourt l’Europe de 1967 à 1970 en fondant tout d’abord un trio, avec le saxophoniste Louis Mialhe et le contrebassiste Marc Berthet auxquels se rajoutent successivement le saxophoniste Jacques Gouadin et le pianiste Éric Fontes pour former un quartet puis un quintet.

Pour avoir joué avec lui, Roger Lafosse, directeur du festival Sigma à Bordeaux de 1965 à 1995, grand amateur de jazz et saxophoniste, dira : « Jacky Craissac avait un tempo solide et puissant qui portait bien le groupe ».

Lors de ses tournées et festivals, des critiques de jazz le distinguent pour ses solos au festival de jazz de Palerme en Sicile, en 1966, Claudio Lo Cascio (pianiste, chef d’orchestre qui a énormément contribué au développement du Jazz dès 1956 en Sicile, professeur à l’université et au conservatoire de Palerme…) le compare aux batteurs Max Roach, Elvin Jones ou encore Roy Haynes.
Il est également salué par la critique pour sa prestation au festival de musique contemporaine d’Aix-en-Provence en 1971.

Un ex-bassiste de Miles Davis et le pianiste Vince Benedetti, musicien de Pharoah Sanders et Ann Peter, une des Peters Sisters, l’engagent pour partir en tournée.

En 1970, il obtient le premier prix de batterie et de percussion soliste au festival de jazz de Zurich.

Jacky Craissac amène le Modern Jazz à Bordeaux.

Il donne des concerts à l’ORTF de Bordeaux avec son trio et en tant que percussionniste et batteur de l’orchestre du Jazz-Workshop de Bordeaux-Aquitaine dirigé par Jean Courtioux.
« Le “Jazz-Workshop” prend définitivement forme en 1966. Grâce à l’accueil de la station régionale de l’O.R.T.F., il se produit régulièrement et contribue à élargir le public du jazz moderne jusque-là restreint à Bordeaux. Les piliers en sont les compagnons de Jean Courtioux : Jacques Gouadin (sax), Louis Mialhe (tp, tb), Jacky Craissac (dms), Jean Bielsa (tp)… », (présentation de SIGMA du 10 mars 1970).

Jacky Craissac s’intéresse également à d’autres formes d’expression artistique.

Il compose un ballet pour danseuse soliste. Exploitant à l’extrême les possibilités sonores que lui offre la batterie, il compose la musique polyrythmique d’un ballet conçu pour danseuse soliste et batterie intitulé 1+1=1.
Ce ballet est présenté pour la première fois au Maroc en 1966, au Portugal en 1971 dans le cadre des échanges culturels entre les villes de Bordeaux et Porto, puis en France.

Les critiques soulignent le caractère avant-gardiste et contemporain de cette création.

Dans le même temps, il commence à travailler en collaboration avec des artistes contemporains, plasticiens, metteurs en scène, chorégraphes, écrivains.

En 1972, il rencontre le poète et musicien africain Francis Bebey et participe à l’émission Musiques pour Textes avec Gébé sur France Culture.

Son éclectisme et l’originalité de ses méthodes pédagogiques le font remarquer par des artistes et des enseignants reconnus tels que M. et Mme Rondeleux, professeurs à l’Institut de Recherche de Paris et à l’école Mudra de Maurice Béjart.

Par la suite à Bordeaux, la compagnie de théâtre Guy Lenoir, le ballet théâtre Pyrénéen puis le Théâtre école de Bordeaux (1982) font appel à lui.

Les années 1970 : une période charnière

Jacky Craissac prend conscience que le son de la batterie limite son expression. Il crée un univers sonore acoustique singulier et novateur composé de scies circulaires de tailles diverses, d’obus, de barriques, de tambours et de fûts métalliques.

Et c’est à partir des années 70 que son engagement et sa quête d’un son intérieur le guident vers l’acoustique des matériaux, des harmoniques, des infra basses et des mélodies.

Il donne un concert solo dans une chapelle dans les Landes où il reste vivre pendant deux ans. Cette expérience est pour lui déterminante.

La facture de ses instruments

Le son et l’instant présent sont primordiaux. Ils guident le travail sur la matière. Les bois et les peaux participent de la même quête du son que le métal par le choix des essences, des formes, des dimensions, de la sélection des espèces animales. Par leur intermédiaire, la vie du son et du rythme se manifeste libre de toutes structures.

Dans ce perpétuel mouvement, avec la même énergie, il se consacre à la facture de ses instruments.
Il crée un premier instrument puis suivront le Temps 1, le Temps 2, la Voile, le Nuage, la Voix, l’Oeuf, l’Arbre à nacre… Ces instruments évolueront sans cesse au fil du temps.
Il fait, défait, refait, transforme, crée. Rien ne peut mieux répondre à son besoin organique de son que ses propres réalisations.

Il se présente dès lors, en solo, avec son ensemble de percussions.           

En 1974, le festival contemporain SIGMA, qui a fait de Bordeaux l’un des rendez-vous européens des avant-gardes, lui offre une place d’honneur pour présenter sa première création Synthèse d’une vie par le rythme.
Il joue au cœur d’un espace scénique acoustique composé d’une cinquantaine d’instruments, de matériaux hétéroclites et d’instruments ethniques dont il dit que le son le rejoint, le balafon, la darbouka et des bols chantants.

Il se présente en concert solo avec son ensemble de percussions à Saint-Médard-en-Jalles (1974), à Rodez (1976), au Forum Le Parvis à Tarbes (1976), au café-théâtre Le Germinal à Bordeaux lors du festival Off de SIGMA 16 (1980), au Théâtre Fémina à Bordeaux (1984), au Palais Jacques Coeur à Bourges (1985).

En 1978, il participe avec son ensemble instrumental à une création publique à l’église Monolithe à Saint-Emilion avec les peintres contemporains Morvan, Andréou, Guansé, Guerrier, Labégorre, Lapoujade. Expérience pluriartistique (peinture, musique, poésie et exposition) qu’il renouvellera en 1990 à Laure-Minervois près de Carcassonne dans le cadre de l’Art et le Vin.

En 1981, il est invité au festival d’Uzeste avec son école et pour donner un concert en solo.

En 1983, il crée la musique des ballets Turbulent silence et Passante de l’Atelier de recherche chorégraphique Sylvie Tarraube-Martigny présentés en Aquitaine à l’Abbaye d’Arthous lors du festival des Abbayes et au conservatoire Jacques Thibaud à Bordeaux.

En juin 1986, grâce à l’appui de Florence Mothe, écrivaine, critique musicale de Sud-Ouest, productrice de programmes sur France Culture et France Musique, Jacky Craissac fait l’objet d’un reportage dans l’émission d’Antenne 2 A nous deux, le magazine de Patrick Poivre d’Arvor et donne deux concerts à la Bibliothèque municipale de Bordeaux avec le soutien de la ville de Bordeaux et du Conseil Départemental de la Culture.

En novembre 1987, Sigma 22 programme son concert Méditation en création mondiale dans l’église Saint-Louis-des-Chartrons à Bordeaux où le public découvre un nouvel instrument, l’Aïa, composé d’une pièce de réacteur et de plateaux de fusée.

Du 1er au 25 avril 1987, une exposition est consacrée à son œuvre aux Entrepôts Lainé par ce même festival.

A partir des années 1990…

Voici ici quelques lieux emblématiques où Jacky Craissac s’exprime avec son ensemble de créations instrumentales :

  • A Brive (19-Corrèze) pour une création publique peinture – percussion avec Jean-Jacques MORVAN, peintre Officiel de la Marine, sculpteur et poète en 1993 dans le cadre De liberté en liberté. Temps fort d’un évènement qui est une première nationale organisée par le Centre de la Résistance et de la Déportation Edmond Michelet, la ville de Brive et en coopération avec l’Éducation Nationale.

  • A Bordeaux (33-Gironde) au Théâtre Molière, scène d’Aquitaine en 1996 pour une résidence et en 1999 où il présente Inspiration Flamenca en hommage à son grand-père et son arrière-grand-père.
  • Sur commande du Ministère de la Culture et du Conseil Régional d’Aquitaine, il crée en 1999 « Mélodie de sons » dans son atelier de création d’Escaudes, la musique de la pièce de théâtre Dialoguer-Interloquer de Xingjian GAO, écrivain, dramaturge,metteur en scène et peintre français d’origine chinoise, Prix Nobel de littérature en 2000 pour son livre La montagne de l’âme.
    Pièce qui sera présentée au Théâtre Molière, scène d’Aquitaine à Bordeaux en 1999, au Théâtre de la Halle Festival Avignon 2001, à Paris…

  • A Porto 2001, capitale culturelle européenne, au Teatro Do Campo Allegre, dans le cadre des échanges entre les villes de Bordeaux et de Porto. Jacky Craissac y donne trois concerts dont un aux délégations officielles des villes de Bordeaux et de Porto, en présence de M. Alain JUPPE, maire de Bordeaux et de M. le maire de Porto..

  • A Francfort et à Darmstadt, dans la cour du Regierungspräsidium, en 2003 au festival d’été du Süd Hessen. Cet évènement s’est inscrit dans le cadre de la coopération entre la région Aquitaine (Nouvelle Aquitaine) et le Land de la Hesse. Et aussi du partenariat avec l’Institut Culturel Français et le Gallus Theater de Francfort. Il reçoit un accueil très chaleureux et une excellente critique.

  • A Gradignan (33) en 2006 au Théâtre des Quatre Saisons où il joue à guichet fermé.

Son œuvre puissante et unique, son approche transversale de la musique ainsi que sa vision particulière de l’art ont réellement de quoi intéresser la filière Musique de l’université Bordeaux Montaigne et le conservatoire de Bordeaux.

  • A Bordeaux en 2007 au Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine (TnBA) dans un partenariat Conservatoire de Bordeaux et Musique de Nuit Diffusion.

  • Il est invité aux Journées de l’Improvisation 2007 organisées par VivaArte de la filière Musique de l’université Bordeaux Montaigne.
  • Le conservatoire de Bordeaux organise la Nuit de la Création au CAPC Musée d’Art Contemporain de Bordeaux, avec Jacky Craissac comme artiste invité le 10 avril 2010, sur la thématique « Cordes pincées et percussion ».

Le 15 février 2010, deux mois avant cette consécration, Jacky Craissac décède dans la discrétion, chez lui à Escaudes.

Tenant à lui rendre hommage, le conservatoire lui dédie cette soirée. Le CAPC accueille les instruments qu’il avait choisis de jouer. Des séquences de ses œuvres sont diffusées dans l’espace de la grande nef des Entrepôts Lainés.

VIDÉO : DÉDICACE 2010

Trio Jacky Craissac, festival de Palerme 1966
Excellente critique Claudio Lo Cascio, festival de Palerme, 1966
Tournée en Italie
En trio avec Lou Bennett au piano
En trio avec Claude Wesly au violon et Christian Ibanez au piano
254 S Fonds Sigma – Quartet Jacky Craissac avec Eric Fontes, Marc Berthet…
Sessions de Bordeaux, Sud Ouest, 1970
Avec des musiciens américains pour une tournée internationale
Avec des musiciens américains pour une tournée internationale
Avec des musiciens américains pour une tournée internationale.
Trio Jacky Craissac, Aix en Provence, 1971
Festival Sigma 10, 1974 Création Jacky Craissac, Synthèse d’une vie par le rythme, (photo Philippe Taris)
Sigma 10, 1974, Eric Mazens
Forum Le Parvis à Tarbes, 1976
Palais Jacques Cœur à Bourges, 1985
Sigma 22, église Notre Dame Bordeaux Instrument Aïa, 1987
Création publique peinture percussions avec le peintre Jean-Jacques Morvan à Brive, 1993
Résidence de création Théâtre Molière Scène d’Aquitaine Bordeaux, 1996
Création « Mélodie de sons » 1999 pour la pièce de théâtre Dialoguer/Interloquer de X. GAO
Capitale européenne
Concert Méditation dans le cadre de Porto 2001 et des échanges entre les villes de Bordeaux et de Porto
Festival d’été Süd Hessen – Coopération Hesse-Nouvelle Aquitaine
Création Gradignan 2006 – La roue
Nuit de la création 2010 – Exposition des instruments de Jacky Craissac au CAPC Bordeaux